Mer Noire de tous les dangers

Publié le 05 décembre 2025

Cette étendue d’eau est redevenue, depuis la tentative d’invasion russe de l’Ukraine, une vaste zone de guerre.

L’ avenir de la sécurité de l’Europe se joue en grande partie sur ses rives. Espace géostratégique à la confluence du Vieux Continent, de l’Asie centrale et de la Russie, la mer Noire est
aujourd’hui au cœur de toutes les inquiétudes. Et pour cause: cette étendue d’eau de 436 000 km2 – dont le contrôle représente depuis des siècles un enjeu clé pour les puissances riveraines –, est redevenue, depuis la tentative d’invasion russe de l’Ukraine, une vaste zone de guerre.

Intentions russes et résistance ukrainienne

Dès l’annexion de la Crimée par Vladimir Poutine en 2014, la maîtrise de la mer Noire s’est imposée à l’épicentre du conflit entre Moscou et Kiev. Cet espace convoité, bordé par six États aux intérêts opposés – la Russie, deux membres de l’UE, la Roumanie et la Bulgarie, et trois pays qui lorgnent sur elle (Ukraine, Géorgie et Turquie) – voit au surplus transiter par lui le gazoduc TurkStream. Territoire de faille géopolitique! Depuis 2022, Moscou y a déjà imposé un nouvel ordre stratégique via la conquête de la plupart des ports et littoraux ukrainiens en mer d’Azov et au nord de la mer Noire. Dans cette guerre de positions acharnée, la résistance ukrainienne s’organise en particulier à Odessa, cette « perle de la mer Noire » et plus grand port du pays que Moscou désire à tout prix… Surtout après un premier débarquement raté en 2022 au prix d’une trentaine de navires russes coulés ou endommagés. Si le Kremlin avance ses pions dans toute la région, comme en Géorgie, à partir de la République séparatiste pro-Moscou d’Abkhazie – avec deux bases russes déployées –, les autres puissances riveraines n’ont pas dit leur dernier mot.

L’OTAN présent sur trois rives

La Turquie, en tête, qui contrôle les accès de cette mer quasi fermée, les détroits du Bosphore et des Dardanelles, par lesquels transitent notamment les exportations en céréales ukrainiennes et russes. Dès lors, Ankara se distingue par son rôle clé de maintien de l’équilibre entre intérêts russes et occidentaux, même si l’exercice n’en reste pas moins délicat pour ce pays membre de l’Otan. D’autant que l’Alliance atlantique, dont font aussi partie la Bulgarie et la Roumanie, pourrait préparer les pays alliés à un éventuel affrontement direct avec la Russie en mer Noire. Preuve en est: l’extension d’une des plus grandes bases militaires européennes de l’Otan sur les côtes roumaines pouvant accueillir 10 000 soldats…