L’assurance Risques Politiques : un levier stratégique face à la recomposition géopolitique mondiale

Publié le 18 décembre 2025

Alors que l’année 2025 touche à sa fin, les entreprises multinationales évoluent dans un environnement où fragmentation géopolitique, tensions commerciales, incertitude économique et ruptures technologiques se superposent toujours davantage. Cette recomposition rapide impose une nouvelle lecture du risque politique et renforce la nécessité d’outils capables de sécuriser les investissements internationaux. Comme le soulignent Julian Alovisi, Head of Political Risk Research, et Peter Evans, Research Director chez Howden Broking, l’année 2025 a marqué un tournant : jamais l’Assurance Risques Politiques (en anglais Political Risk Insurance, « PRI ») n’a été aussi pertinente ni aussi stratégique pour les directions financières et les comités d’investissement.

Le rapport Howden 2025 intitulé « Stepping up », fondé sur les réponses de près de 500 dirigeants des risques et trésoreries de multinationales américaines, britanniques et françaises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard de dollars, confirme que la matérialité du risque politique n’est aujourd’hui plus une hypothèse théorique. Plus d’une entreprise sur deux, soit 51 %, déclare avoir subi une perte liée à un événement politique entre 2020 et 2025. Les atteintes aux droits de propriété et les restrictions de convertibilité sont chacune citées par 40 % des répondants, suivies de la violence politique, à 33 %. Ces pertes ne sont pas marginales : 6 % des entreprises sondées ont même subi des chocs financiers supérieurs à 100 millions de dollars, révélant l’existence de risques rares mais potentiellement dévastateurs.

Dans ce contexte, les entreprises renforcent naturellement leurs dispositifs de gestion. L’étude montre que 80 % d’entre elles prévoient d’utiliser au moins un outil de gestion du risque politique d’ici 2030, contre 68 % sur la période 2020‑2025. La tendance la plus marquante concerne toutefois le PRI : il s’agit du produit d’assurance qui enregistre la plus forte progression anticipée. La dynamique représentée dans la Figure 8 du rapport illustre clairement que le PRI surpasse tous les autres instruments en termes de hausse de la demande potentielle, témoignant d’un basculement culturel dans l’approche du risque politique.

Le PRI s’impose d’autant plus qu’il procure un avantage financier concret et immédiat. Selon les données présentées dans la Figure 10, la souscription d’un PRI permet de réduire le coût du capital d’un projet en marché émergent d’environ 15 % à 11 %, ce qui équivaut à une économie annuelle moyenne d’environ deux millions de dollars par investissement. À l’heure où les entreprises cherchent à sécuriser leurs marges tout en maintenant leurs ambitions internationales, cet impact direct sur le coût de financement transforme le PRI en véritable instrument d’ingénierie financière, au même niveau que certaines garanties bancaires ou couvertures sophistiquées de trésorerie.

Le paradoxe est pourtant évident : malgré son utilité démontrée, le PRI reste sous‑utilisé. L’obstacle principal n’est pas financier, réglementaire ou opérationnel, mais cognitif. Le rapport montre que 73 % des entreprises qui n’ont pas souscrit de PRI au cours des cinq dernières années invoquent un manque de compréhension du produit comme première raison de non‑achat. Cette méconnaissance nourrit également une perception erronée d’inutilité, citée par 54 % des répondants. On observe également des marges d’amélioration côté marché : parmi les acheteurs récents, certains évoquent des coûts perçus comme élevés, des difficultés dans la gestion des sinistres ou des conditions contractuelles jugées trop restrictives. Ces points relèvent toutefois davantage d’un besoin de pédagogie, de transparence et d’ajustement commercial que d’une limite structurelle du produit.

Le PRI se trouve ainsi à un moment charnière. La demande s’accélère, la valeur démontrée est tangible, la matérialité du risque politique est établie et les freins restants relèvent essentiellement d’un déficit d’explication. Dans un monde fragmenté où les chaînes d’approvisionnement, les investissements stratégiques et les opérations sur les marchés émergents sont plus exposés que jamais, le PRI n’est plus un produit de niche. Il devient un outil stratégique au service de la stabilité des investissements, de la continuité des opérations et de la croissance internationale.


Accès au rapport Howden Political Risk 2025 : https://www.howdengroupholdings.com/reports/2025-cpri-report