Les rumeurs de ces derniers jours se sont confirmées en Birmanie. Après la victoire du parti d’Aung San Suu Kyi en novembre 2020, les tensions ont ce lundi découlé en un putsch militaire. Dans un « message au peuple » sur Facebook, la porte-parole du gouvernement et son président Win Myint appellent la population « à ne pas accepter » ce putsch militaire.
En novembre 2020, les législatives ont donné la victoire à hauteur de 83% pour la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND). Le parti de Aung San Suu Kyi garde alors largement le contrôle du Parlement, ce qui en fait la cheffe du gouvernement avec 396 sièges sur 476. Depuis cette victoire, l’armée et son commandement n’ont cessé d’exprimer des réserves quant à ce score. Les tensions se confirment au fil des semaines et l’armée accuse publiquement la LND de fraude.
Le résultat des élections, catalyseur des tensions entre l’armée et le gouvernement
L’armée a donc pris les choses en main et décidé ce lundi d’arrêter les grandes figures du parti, dont la porte-parole de la présidence et prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, et son président Win Myint. Le président de la LND Win Htein publie dans la foulée un message pour la population, en encourageant le rejet de ce coup d’Etat. L’armée a elle proclamé un état d’urgence pour un an, avec aux commandes le général Min Aung Hlaing. Ce dernier concentre désormais dans ses mains le pouvoir législatif, administratif et judiciaire. L’état physique et le lieu d’arrestation de la leader du LND ne sont pas encore clairs et entraînent des inquiétudes.
L’ancienne lauréate du prix Nobel de la paix avait été la cible de critiques depuis quelques années. En septembre dernier, Aung San Suu Kyi a formellement été exclue des lauréats du prix Sakharov des droits de l’Homme par le Parlement Européen. La raison de cette sanction ? Les Nations Unies et le Parlement de Strasbourg reprochaient à la militante « son inaction et son acceptation des crimes en cours contre la communauté Rohingya ». Selon le Parlement Européen, cette sanction était le prix de sa passivité quant au « nettoyage ethnique » subit par la communauté Rohingya. Pour rappel, dès août 2018, les Nations Unies accusent les hauts gradés de l’armée birmane de « génocide » et l’opinion publique regrette le manque d’implication et de prise de position de Aung San Suu Kyi.
Ce coup d’état marque en tout cas un nouveau tournant dans l’histoire de la Birmanie, seulement dix ans après la fin de la dictature militaire précipitée par Aung San Suu Kyi. La communauté internationale dans son ensemble a condamné ce putsch et la population redoute un retour à un régime militaire dur pour de longues années. Une nouvelle preuve en tout cas de la fragilité des chemins vers la démocratie.