Élodie Chapel, co-fondatrice d’Élixir Health et lauréate du palmarès Choiseul Alsace, partage un regard à la fois personnel et engagé sur la santé des femmes. À travers son parcours et son combat pour une fertilité digne, elle interroge les angles morts de l’égalité et appelle à changer de regard sur ces enjeux trop longtemps invisibilisés.
Être à la fois ordinaire et extraordinaire
Je ne suis pas un symbole. Je ne sais pas si des femmes se reconnaissent en moi. Je suis suffisamment spéciale pour que des gens que j’admire se souviennent de moi, et suffisamment commune pour que l’on me confonde avec quelqu’un que je ne connais pas.
À travers ce classement, si je peux faire passer un message, ce sera à partir de ce que j’ai vu, ressenti, analysé de la condition féminine en treize ans de carrière. Car je suis suffisamment extraordinaire et ordinaire à la fois pour être toutes les femmes qui me liront.
Réconcilier émancipation et maternité
Pourquoi ai-je choisi de m’engager dans un projet comme Élixir Health ? Pourquoi avoir voulu construire une entreprise scientifique dans des domaines aussi sensibles que la santé et la fertilité ? Parce que, trop longtemps, on a confondu l’émancipation des femmes avec l’émancipation de la maternité — comme si s’en affranchir suffisait à libérer.
Mais une liberté réelle suppose le choix : celui de ne pas avoir d’enfants, bien sûr, mais aussi celui d’en vouloir, d’en avoir, et d’y accéder dans des conditions dignes. Tant que des femmes seront freinées dans leur carrière parce qu’elles ont des enfants, parce qu’elles en désirent, ou parce qu’elles n’y parviennent pas, cette liberté restera incomplète. Tant que tomber enceinte relèvera du parcours du combattant — médical, administratif, psychologique — nous ne pourrons prétendre à une égalité pleine et entière.
J’ai entendu la parole de femmes héroïques dans le sacrifice de leur corps et de leur santé mentale pour atteindre cet enfant tant désiré. J’ai vu l’étrange normalité technique qui entoure les grossesses arrêtées, alors qu’un monde s’écroule autour d’elles. J’ai observé les injonctions contradictoires autour du corps, la solitude face aux diagnostics, l’absence de solution. J’ai vu des femmes brillantes douter d’elles-mêmes parce qu’elles vivaient une attente qu’on qualifie d’anormale, quand le plus naturel leur échappe.
La santé des femmes, un combat collectif
Il fallait un changement de regard. Une approche rigoureuse, empathique, fondée sur la science, mais aussi sur l’expérience vécue. C’est ce que nous avons voulu construire avec Élixir Health.
Parce que ces réalités ne sont pas marginales. Elles traversent les parcours professionnels, personnels, intimes de millions de femmes. Parce qu’on ne peut plus parler d’égalité sans s’emparer de ces angles morts. Parce que la santé des femmes, leur fertilité, leur maternité — qu’elle soit choisie ou non — ne peuvent plus être reléguées à la sphère du non-dit.
Je n’ai pas de leçon à donner. Seulement une conviction : ce combat mérite notre attention, notre énergie, notre exigence. Et s’il faut de la ténacité pour faire émerger ces sujets dans un monde qui les a longtemps minimisés, alors j’en aurai.
Ce n’est pas un sujet simple. Il touche à notre rapport au corps, au désir, à l’humain, à l’égalité. Il interroge ce que nous voulons voir advenir. Paul Valéry écrivait : « Tout ce qui est simple est faux, mais tout ce qui ne l’est pas est inutilisable. » Ne reculons pas devant la complexité. Investissons-nous pour comprendre, pour agir, pour construire des réponses. C’est ainsi que l’on tiendra, enfin, la promesse d’égalité.
Retrouvez l’intégralité du classement Choiseul Alsace 2025 sur le site de l’Institut Choiseul.