Réintégrer la pratique manuelle à l’école doit être une priorité nationale

Publié le 15 février 2024

En dressant injustement des murs entre le manuel et l’intellectuel, notre société a presque fait disparaître l’intelligence de la main de notre quotidien, et de notre imaginaire collectif, jusqu’au sein même de l’école républicaine. La conséquence la plus visible de ce choix politique est économique, mais elle est aussi sociale. La pratique manuelle est un puissant levier pour favoriser les apprentissages.

Un lien rompu entre les apprentissages et la pratique manuelle

Au sein de la société, tout a été fait pour rompre le lien entre les apprentissages et la pratique manuelle. Les savoir-faire sont sur le fil en matière de transmission et de recrutement. En France, en 2021, la part de l’industrie manufacturière dans le PIB est tombée à 9% quand elle est de 19% en Allemagne. Comment en sommes-nous arrivés là ?

Au sein du système éducatif, tout a été fait pour rompre le lien entre les apprentissages et la pratique manuelle, et encourager 80% d’une classe d’âge à obtenir le baccalauréat. Depuis des dizaines d’années, plus aucun temps ne permet au jeune de se confronter à l’intelligence de ses mains. Ce sont des vocations qui ne s’allument pas. C’est aussi une absence d’information à l’heure de l’orientation sur ces filières. C’est, enfin, une détermination de l’ensemble de la société à faire de notre nation un pays d’intellectuels uniquement.

L’intelligence manuelle, un puissant levier d’apprentissage

La pratique manuelle est pourtant un puissant levier pour favoriser la réussite des élèves. En matière de choix d’orientation comme en matière de résultats scolaires, les jeunes Français sont essentiellement déterminés par leurs aptitudes académiques. Or, on le sait, le système scolaire français tel qu’il est conçu n’est adapté qu’à une minorité d’élèves. Il étouffe les talents et la confiance de milliers d’enfants dont l’intelligence s’exprime autrement. Car si les apprentissages ne sont pas connectés à la réalité, le jeune a beaucoup plus de chances de décrocher.

Il y a quarante ans, chaque collégien avait, dans son emploi du temps, un cours d’Enseignement manuel et technique (EMT). Ces cours de pratique manuelle permettaient au jeune de mobiliser les connaissances acquises lors de ses cours de mathématiques, physique-chimie, histoire, de façon transdisciplinaire, en vue de concevoir un objet en vannerie, ferronnerie, couture, etc. Lorsque l’on sait qu’un élève retient 80% de ce qu’il fait, contre 20% de ce qu’il entend, on ne peut que plaider pour une pédagogie qui passe par la pratique.

L’intelligence manuelle est un puissant levier d’apprentissage. C’est une façon de créer des connexions logiques dans le cerveau de l’enfant en tissant des liens entre le théorique et le sensible, et de leur donner le goût de la matière, pour peut-être susciter des vocations ! Mais c’est aussi un formidable levier pour redonner toute leur place aux entreprises artisanales et industrielles dans la société en permettant à leurs salariés d’intervenir au sein du système éducatif.

Les intertitres sont de la rédaction. Cette tribune est à retrouver dans le deuxième numéro de Choiseul Magazine, disponible en kiosque depuis le 25 janvier 2024.