Faire de la mer un levier de souveraineté industrielle, de décarbonation et d’emplois — en France et en Europe

Avec un chiffre d’affaires en croissance de plus de 16 milliards d’euros et plus de 57000 emplois directs, la filière navale est le 4e créateur net d’emploi dans l’industrie depuis 2008.

L’industrie navale est essentielle pour la sécurité économique de l’Europe et de la France. Elle permet de construire et d’entretenir des navires et des plateformes indispensables au commerce, à l’approvisionnement en énergie (renouvelable) et aux infrastructures maritimes et sous-marines critiques, telles que les parcs éoliens offshore et les câbles sous-marins. Elle construit aussi les navires et les sous-marins qui assurent notre défense et notre sécurité, pour protéger nos intérêts sur les mers et dans nos outre-mer.

Mais peut-on rester une grande puissance souveraine, commerciale, énergétique et militaire si nous perdons notre capacité à concevoir, construire et maintenir en condition nos navires en France, voire en Europe ?

Nous sommes aujourd’hui face à cette question immédiate, qui invite à un sursaut face à un péril économique inédit.

La seule proposition collective pertinente consiste à mettre en œuvre une stratégie industrielle maritime dans l’Union Européenne avec un complément national pertinent, sur 10 ans. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’en existe aucune aujourd’hui.

Pour redevenir une puissance maritime souveraine grâce à une puissance industrielle retrouvée, il convient en particulier de :

  • Reconnaitre l’entièreté de la filière des industries maritimes comme stratégique: depuis les armateurs jusqu’aux chantiers navals en passant par les ports, la logistique et les équipementiers ;
  • Accepter la préférence européenne, voire nationale dans les achats publics avec une harmonisation des incitations nécessaires pour les armateurs et un accès conditionnel aux financements des banques publiques et aides communautaires
  • Lutter contre le dumping, les pratiques déloyales non européennes et les investissements étrangers sur nos actifs grâce à des mécanismes de réciprocité ;
  • Investir et innover à grande échelle en créant l’alliance européenne de l’industrie maritime pour atteindre en 2035 10 milliards d’investissements supplémentaires et 500000 emplois directs en Europe.

La France a donc besoin d’un plan structurant du maritime, centré sur la question industrielle et s’appropriant la stratégie européenne

Sur le comment, une « mission interministérielle » au sens de la Loi Organique sur les Lois de Finances (LOLF), appelée « Ambition maritime de la France » (nom non-officiel) permettrait de solidifier la partie budgétaire relevant de l’Etat pour cette politique et de la décliner par ministère et traçabilité des programmes budgétaires.

Des objectifs 2035 en production, exportation, emploi, neutralité carbone, défense, sécurité et impact ultra-marin seraient alors définis en adéquation.

Le plan « France Mer Industrie 2035 » (nom non-officiel) s’appuierait en particulier sur :

  • Un fonds de modernisation et de transformation de la flotte de commerce
  • Un plan pour réindustrialiser/relocaliser les filières de production d’équipements maritimes (propulsion, électronique, systèmes embarqués)
  • Des programmes incrémentaux (démonstrateurs technologiques sous statut de flotte d’Etat ou de DSP)
  • Des incitations fiscales (du type amortissement ou suramortissement) pour lutter contre la concurrence déloyale, rétablir la compétitivité réelle
  • Un choc de simplification par des normes pro-industrie, coconstruites ou entretenues, réactives pour sécuriser les nouvelles technologies et la décarbonation.
  • Un fléchage des systèmes d’échanges de quotas carbone (EU-ETS) garantissant que les versements du secteur maritime reviennent au maritime pour financer les solutions vertes : impact énergétique des navires, transformation des ports en, hub multi-énergies décarbonées, renforcement de la capacité de production des équipements correspondants.
  • Un volontarisme pour exporter plus en renforçant les garanties publiques à l’export, en soutenant financièrement les PME dans les salons sectoriels à l’étranger, en aidant au développement de VIE « filière ».
  • Une attractivité pour renforcer l’emploi et l’évolution des métiers en créant un écosystème favorable.