Une thaïlandaise condamnée à 43 ans de prison pour avoir insulté la monarchie

Face à la montée en puissance des contestations anti-monarchie, les autorités thaïlandaises durcissent la répression judiciaire, brandissant l’article 112 sur le crime de lèse-majesté. Depuis décembre 2020, la jeunesse urbaine exige une « réforme de la monarchie », après des mois de manifestations estudiantines et l’inculpation d’une quarantaine de militants. 

Anchan Preelert, une Thaïlandaise de 65 ans, a à son tour été condamnée à 43 ans de prison pour avoir partagé sur les réseaux sociaux un clip audio tourné en 2014 par le militant Hasadin Uraipraiwan, contenant des passages jugés diffamatoires à l’égard de la monarchie. Il s’agit de la peine la plus sévère jamais prononcée en vertu de la loi de lèse-majesté. 

Crime de lèse-majesté

Quiconque “diffame, insulte ou menace le roi, la reine, l’héritier apparent ou le régent” est susceptible d’écoper entre 3 et 14 ans de prison pour chaque accusation, d’après la loi de lèse-majesté du Code civil thaïlandais. Estimant avoir porté atteinte à l’intégrité du royaume, les autorités ont attribué 29 chefs d’accusation à cette ancienne fonctionnaire du centre des impôts, portant sa peine à 43 années de prison. En plaidant coupable, Anchan Preelert a échappé à la peine initiale de 87 ans de prison.

Une démonstration de force supplémentaire de la monarchie thaïlandaise qui intervient dans un contexte de contestations pro-démocratiques tendu. Alors que l’affaire remonte déjà à six ans, la condamnation de la principale accusée rend compte du durcissement de la politique judiciaire du royaume, à laquelle s’ajoute la condamnation récente d’une quarantaine de militants pour ce même crime. “Cette loi draconienne est à nouveau utilisée à plein par le régime et sans discernement contre toute voix dissidente”, explique le politologue Thitinan Pongsudhirak interrogé par l’AFP. 

 Mouvement pro-démocratique estudiantin

Comme en témoignent les récentes manifestations antigouvernementales rassemblant des dizaines de milliers de personnes, réclamant la démission du Premier ministre Prayut Chan-o-cha et la réécriture de la Constitution et de la réforme monarchique, le roi Maha Vajiralongkorn et, à travers lui, le pouvoir de la famille royale, sont de plus en plus contestés. Avec la répression des autorités et des ultraroyalistes, la loi pourrait avoir un but dissuasif, décourageant les étudiants engagés depuis des mois. Mais le recours à cette loi pourrait, selon M. Pongsudhirak, avoir l’effet inverse et “détruire la réputation de l’institution de la monarchie aussi bien au niveau national qu’international”.